mercredi 17 octobre 2012

Equitation = communication et comportement

La preuve que l'attitude mentale et corporelle influence, modifie, fixe la nature de la relation qui s'installe avec le cheval, c'est Historico qui en a fait une belle démonstration lors de la venue de K. V., nouvelle "adepte" (si je peux m’exprimer ainsi) pour laquelle j'ai convié ce cheval à exposer les fondements de cette forme d'équitation. Par convié, je veux dire le fait d’aller dans une pâture de plusieurs hectares un licol à la main, d’appeler le cheval et … de constater que le cheval, de son propre chef, manifeste l’envie de venir à notre rencontre, de mettre son licol et de nous suivre ! Je crois que nous avons pu illustrer de façon significative cette "union" d’ordre moral dans un premier temps, qui débouchera sur l'équitation dans un deuxième temps. C'est là où comme l'ont dit Guillaume Antoine et Gérard Dorsi :
l'équitation, c'est une affaire de communication, de comportement.

Que s'est-il passé ?

· La première des choses est l'état d'esprit avec lequel on aborde le cheval ; c'est à dire l'attitude (pour ne pas dire les attitudes) avec laquelle on entre dans l'espace du cheval. Le principal étant de se placer en sorte que l'on est en droit de ... rien ! Je n'attends rien du cheval, je ne vais rien lui demander, je ne vais rien exiger, je ne cherche qu'une chose, c'est m'assurer que le cheval comprenne que comme lui, je vis dans ce monde, dans cet espace, et que tous deux, nous sommes issus de la création ; et à ce titre, nous avons les mêmes droits ( ?devoirs ?) d'utilisation de cet espace. Pour reprendre une expression, nous ne sommes pas obligés d'être les meilleurs amis du monde, mais nous avons le devoir d'être "polis", respectueux l'un envers l'autre. C'est ce que je référence comme étant le respect des espèces qui cohabitent, en étant vigilent au fait que l'homme colonise toute la planète, c'est un fait, mais il a le devoir de respecter les autres espèces qui ne doivent ni disparaître, ni être asservies, ni parquées comme les américains l'ont si bien fait avec les tribus indiennes (c'est la première image qui me vient à l'esprit). En étant conscient que si l'homme est reconnu comme espèce "supérieure" aux autres par ses facultés de raisonnement, d'actes réfléchis, d’intelligence, etc..., cette "intelligence humaine" doit être au service des autres espèces et dans ce cas, du cheval avec lequel une relation peut s'établir. Dans relation résonne le mot partage. Dans espèces de la création, je ne peux ignorer que "la nature ne crée rien d'inutile", donc les uns comme les autres, nous avons tous notre place au sens de l'importance que représente le maillon d'une chaîne constituée de millions de mailons ! Ce qui m'amène tout naturellement à penser que l'état de chaque maillon a son importance sur la qualité de la chaîne ! Si l'homme, par son intelligence, prend conscience de ça, il doit être vigilant quant à la qualité de tous les maillons et faire en sorte que tous aillent bien ! Il doit prendre en considération qu'il en va de sa survie, et de son évolution (d'espèce). Et à plus forte raison, ne pas détruire un ou plusieurs des maillons ; l'image qui me vient à l'esprit est celle de "couper la branche sur laquelle on est assis", image tellement simpliste et pourtant si réelle. Nos actes personnels ont toujours une conséquence sur l’ensemble. Aussi minime soit-il, quelle que soit la nature de nos actes, ils ont une répercussion sur le « tout » dont nous faisons partie. C’est, pour faire une autre image, le principe du grain de sable sur la plage : à l’échelle humaine, c’est insignifiant ; à l’échelle microscopique, c’est gigantesque !


· Le cheval me reconnaissant et m'acceptant dans son espace, et seulement dans ce cas, ce qui sous-entend que je dois être reconnu et accepté par le cheval avant d'envisager quoi que ce soit avec lui, je ne lui demande rien, n'exige rien, car je n'en ai aucun droit ! Par contre, je m'aperçois que le cheval ayant accepté l'homme, adopte ce que les éthologues ont référencé comme étant le "réflexe du cheval suiveur". C'est pour moi l'indice majeur que le cheval est acceptant, demandeur à partager son espace de vie avec l’homme (Historico avec moi en l’occurrence !). Là, je ne vais rien demander au sens d’exiger, même poliment, mais je vais chercher à « suggérer » et laisser faire le cheval. Il doit avoir l’entière autonomie pour faire mais surtout, il doit garder la possibilité de choisir de faire ou de ne pas faire. D’autre part, quoi que je lui suggère, cela doit avoir du sens ; la meilleure façon d’en donner, c’est de se mettre à la place du cheval ! Avec à l’esprit que tout ce qui lui est proposé, et là je pense à cette foutue « gymnastique » indispensable pour que le cheval devienne suffisamment fort pour nous porter en conservant son aisance naturelle, il faut être conscient que tout est orienté pour le cheval, même si je vais en profiter plus tard ; à la base, c’est pour lui que l’homme réfléchit à des gymniques et des exercices gymnastiques appropriés. En aucun cas il s’agit de flatter l’égo démesuré dont l’humain est si bien doté, ce qui m’amène à la prise de conscience du « bien-fondé » d’exigences vis-à-vis du cheval. Dès que l’homme a des exigences, la relation est pervertie ! Je pense que la seule exigence que l’on puisse avoir, c’est de s’assurer que le cheval conserve et développe son intégrité !
Dans ces conditions, tout peut se produire ! Bien sûr, mon égo est flatté par la manifestation de reconnaissance du cheval à mon encontre ; mais là où tout est différent, c’est que ce qui me flatte, me rend « heureux », est de l’ordre d’une conséquence : le cheval demeure intègre dans notre relation, il conserve tout ce qui m’émeut parce qu’il demeure entièrement libre, nature, vrai, il a gardé sa fraîcheur, il est libre dans son choix de me suivre, de me faire partager sa nature, il n’y a aucune perversion dans cet échange. Mais je ne suis pas en attente de quelque chose pour autant : les choses se produisent … ou pas ! Je crois que si l’on est en attente de …, c’est que l’on a déjà des exigences ! Mais je ne peux que constater qu’avec des intentions pures, natures, les « choses » se produisent toujours.


· Pour Historico, j’ai souvent été nâvré de le voir adopter des postures, des allures, des comportements qui me paraissaient malsains. Et au lieu de l’accepter, de chercher à comprendre, puis de suggérer à ce cheval d’inverser, d’atténuer ces tendances, j’ai imposé des modifications. Et force est de constater que bien peu d’améliorations physiques se sont produites, et avec du recul, je trouve que le mal-être est toujours présent, qu’il n’y a pas d’amélioration flagrante et durable. Pour que tout s’inverse et que ce cheval se « reconstruise », tout doit venir de lui : c’est lui et lui seul qui peut prendre la décision « d’aller mieux ». Je (l’humain) ne peux qu’ouvrir des portes, donner des accès, mais je ne peux pas imposer le changement, je ne peux pas imposer une forme de « guérison ». Il doit se battre pour cela, il doit en avoir l’envie que je ne peux que suggérer. Même si je suis peiné de le voir « tourner en rond », passer probablement à côté de la solution, et là je pense à certains de mes congénères dans certaines situations ( ! ), sans m’oublier pour autant … Nous avons tous nos « casseroles », encore faut-il en être conscient et ne pas « tout faire pour les ignorer ». Pour reprendre une expression :
« à chacun son boulet » !
Abordé dans les conditions du paragraphe précédent, je constate chez ce cheval une forme d’apaisement dans son comportement, une envie de « faire quelque chose avec moi », et quand nous ne faisons rien, une espèce de « jouissance béate » à vivre simplement l’instant présent ! Il y a un sentiment de « lâcher prise ». On se sent bien, une vague de bien-être nous porte, c’est simple, c’est vrai, c’est « nature ». Et je crois que là est l’essentiel…et certainement pas dans un manuel ou une méthode d’équitation décrivant avec précision l’emploi des aides pour obtenir un départ au galop, un changement de pied ou que sais-je encore…
La seule chose importante est le fait que ce cheval manifeste l’envie de …, en étant pleinement conscient qu’en ce qui concerne l’équitation, le cheval en connait déjà tout l’essentiel ! L’équitation est à prendre en compte comme étant du domaine de l’éducation de l’homme ! En effet, le cheval sait déjà marcher au pas, trotter, galoper, changer de pied, être en équilibre, etc… S’il y a un apprentissage à faire, il est en priorité pour l’humain qui doit s’éduquer, s’adapter à une espèce radicalement différente de lui ! Puis d’apprendre une forme de langage (des aides) pour se faire comprendre du cheval ; l’homme doit s’adapter à la nature du cheval, et non l’inverse. En fait, il est évident qu’un minimum de technique est indispensable, mais ce n’est en aucun cas une fin en soi !


· Nous voilà dans des dispositions que je qualifierai de « favorables » à l’échange, au partage…
Concrètement, qu’est-ce qui se passe ? Je replace ici les expressions spontanées de ma « visiteuse » du jour, telles qu’elles me reviennent à l’esprit :
- le cheval est confiant, son œil est apaisé, serein
- il est détendu, mais pas apathique
- conduit en longe, celle-ci n’est jamais tendue
- conduit sur le filet, il garde sa liberté de mouvement sur des rênes flottantes
- je propose, il fait … ou pas et ce n’est pas grave !
- pas de cravache, pas de chambrière, seules les intentions associées au langage corporel suffisent à se faire comprendre et générer du mouvement
- …
- j’en oublie forcément, mais je garde en mémoire son émerveillement du moment !


· Le rapport avec le concept Bauchériste : c’est, à ma connaissance, la seule forme d’équitation qui incite de façon aussi flagrante l’autonomie du cheval dans la pratique de ce qu’il est courant d’appeler la descente des aides ; d’autre part, c’est la seule qui permette au cavalier soucieux du moral et du physique de son cheval, d’avoir des moyens simples pour s’assurer que le cheval demeure décontracté, le laisse le plus libre possible, ce qui permet au cheval de développer se flexibilité. Tout le monde cavalier s’accorde à prôner la légèreté, l’équilibre, etc… Et pourtant, force est de constater que la majeure partie des chevaux sont appuyés sur la main et souvent poussés sur la main par les jambes ; dans ces cas, je me demande où est l’équilibre ? Dans le concept bauchériste, la notion d’équilibre est omniprésente, et se vérifie de la façon la plus simpliste, mais aussi la plus efficace : en effet, le cheval dans la descente des aides, s’il est en équilibre, le mouvement entamé se poursuit seul puisque le cheval n’est ni tenu, ni soutenu par les jambes ou/et la main. Il y a là matière à s’interroger sur le fait que ce concept soit considéré de nos jours comme étant du domaine du passé ! Je conclurai en disant simplement :
“ Si les cavaliers et les  enseignants prenaient connaissance de ce qu’ont laissé les Beudant, Faverot de Kerbrech, Bacharach, et d’autres bauchéristes moins connus, je crois que l’on verrait encore des pur-sangs et autres anglos qui n’auraient rien, mais alors vraiment rien à envier aux “machines de guerre”, fruits de la sélection des éleveurs allemands et de ceux qui leur ont emboité le pas… “

Pour faire un clin d’œil à une amie éleveuse d’Akhal Téké :

Un poulain de deux ans, à ne pas mettre entre toutes les mains, assurément …

1 commentaire:

  1. C'est bien que tu évoques ce souci de relation effectivement, car j'ai tendance à oublier ce privilège. À la maison, il n'y a aucun de mes chevaux qui ne soit pas heureux de me voir et ne salue pas la voiture qui arrive ou ne vienne pas à ma rencontre au galop. Je n'y pense même plus! Et pourtant, il semble que ce ne soit pas le cas pour tout le monde... Tiens ça me fais pensé qu'Historico justement est même venu saluer le van à nôtre arrivée l'autre jour...

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